Pourquoi les plans alimentaires ne fonctionnent pas?

6 janvier 2023

Lorsqu’elles m’approchent pour des consultations en nutrition, plusieurs personnes s’attendent à ce que je leur fabrique un plan alimentaire sur mesure en leur dictant quoi manger, quand le faire et en quelle quantité. Bref, elles s’attendent à ce que je leur construise un menu personnalisé afin de les aider à atteindre leurs objectifs. Bien sûr, je sais que d’autres personnes le font et il serait logique de s’attendre à cela d’une nutritionniste. Ma réponse surprend donc les gens lorsque je leur dis que oui, je pourrais leur faire un plan alimentaire, mais que je ne le ferai pas. En fait, je ne crois pas vraiment à l’efficacité de cette méthode à long terme. Voici pourquoi, à mon avis, les plans alimentaires ne fonctionnent pas.

Le plan alimentaire manque de précision

En tant que nutritionniste, je possède les connaissances pour faire un plan alimentaire. Je peux recueillir des informations en lien avec les données anthropométriques, l’état de santé et le niveau d’activité physique d’une personne, puis les entrer dans des formules mathématiques afin d’avoir une idée approximative de ses besoins en énergie et en nutriments. À partir de ceux-ci, je peux lui créer un menu personnalisé en répartissant ses besoins tout au long de la journée et en tenant compte de la valeur nutritive des aliments.

Toutefois, ceci reste très théorique et ne fait qu’une évaluation grossière des besoins réels d’une personne et de ses apports alimentaires. Par exemple, il est possible d’avoir fait une erreur dans la prise des mesures anthropométriques. Aussi, les formules utilisées ne sont pas parfaites et les résultats obtenus manquent de précision. Entre autres, il est possible d’utiliser une variété de formules pour estimer les besoins et celles-ci peuvent donner des résultats différents. De plus, les données sur la valeur nutritive des aliments sont approximatives et ne représentent pas exactement ce qui sera absorbé et utilisé par l’organisme. Par exemple, 2 pommes peuvent avoir des valeurs nutritives différentes selon l’endroit et la méthode de culture utilisés ainsi que leur degré de maturité. 

Lorsqu’on additionne toutes les petites erreurs qui peuvent d’être glissées en faisant notre calcul, le résultat obtenu n’est pas nécessairement représentatif des besoins réels d’une personne ni de ses apports. Afin de savoir quoi et quand manger plus précisément, la meilleure méthode consiste à se connecter avec son corps et à reconnaître les signaux qu’il envoie pour nous manifester ses besoins.

Le plan alimentaire manque de flexibilité

Les plans alimentaires sont des outils rigides qui manquent de flexibilité. Ils nous dictent à la lettre comment manger sainement afin de contrôler son poids. Ils peuvent nous faire peser les aliments ou nous faire compter des calories. En réalité, les besoins d’une personne varient chaque jour selon différents facteurs comme le niveau d’activité physique et le sommeil. Une journée, une personne pourrait avoir de la difficulté à manger tout ce que son plan alimentaire lui dira alors que le lendemain, elle aura encore faim après avoir mangé tous les aliments « permis» par ce dernier. Ceci entraînera un sentiment de privation/restriction et la personne finira par manger afin d’apaiser sa faim.

Toutefois, comme elle n’aura pas respecté son plan alimentaire, cette personne pourrait ressentir de la culpabilité et manger sans égard à ses signaux de rassasiement parce que tant qu’a avoir l’impression d’avoir échoué, aussi bien en profiter. Manger en pleine conscience en étant à l’écoute de ses signaux de faim et de rassasiement est donc plus fiable qu’un plan alimentaire.

Le plan alimentaire augmente les préoccupations en lien avec la nourriture

La plupart des gens qui me demandent un plan alimentaire ont généralement un but précis, soit celui de manger sainement afin de perdre du poids. À ce moment, le plan agit en fait comme un contrôle externe dictant « la» bonne façon de manger afin qu’ils puissent parvenir à atteindre leurs objectifs. Ainsi, il peut ressembler à une diète ou un régime camouflé et nuire à la relation que nous entretenons avec la nourriture et notre corps.

Le plan nous laisse sous-entendre que certains aliments ont une plus grande valeur que d’autres alors que ce n’est pas le cas. Ensuite, lorsque l’on mange des aliments qui ne figurent pas sur le plan, il est possible de ressentir de la honte et d’avoir l’impression qu’on manque de volonté. Pourtant, se priver d’aliments qu’on aime ne fait qu’accroître notre besoin de s’en procurer. Par exemple, si je te dis ne pense pas à du chocolat, tu penseras à du chocolat et probablement même à ta marque préférée. À mon avis, une saine alimentation inclut une variété d’aliments, incluant des aliments plaisir.

Le plan alimentaire ne tient pas compte de toutes les sphères qui entourent l’acte de manger

Manger est à la fois un besoin biologique, psychologique et social. Il ne se résume pas qu’à fournir des nutriments à son corps pour lui permettre de fonctionner adéquatement. Afin de nourrir sa santé mentale, il est important de respecter ses goûts et ses préférences alimentaires. De plus, les aliments peuvent aider à apaiser des émotions douloureuses et offrir un réconfort dans les journées plus difficiles. Il est tout à fait acceptable de les utiliser le temps que la vague d’émotions redescende et que l’on puisse trouver des solutions plus appropriées.

Manger est également un acte social. La nourriture est présente dans plusieurs rassemblements et festivités. Elle est un symbole culturel synonyme de partage et de traditions. Il serait triste de ne pas profiter pleinement de ces belles occasions avec nos proches puisque ce n’était pas prévu dans notre plan… Ceci aurait pour résultat de créer un sentiment d’isolement et de frustration.

Finalement, je ne crois pas que les plans alimentaires fonctionnent à long terme. Ils manquent de précision et de flexibilité. Ils sont difficiles à maintenir et peuvent entraîner un sentiment d’échec. De plus, ils augmentent les préoccupations en lien avec les aliments et ne tiennent pas toujours compte de nos préférences alimentaires. Qui a vraiment envie de se priver d’aliments qu’il aime, de toujours manger la même chose et de passer son temps à mesurer ses portions? En laissant le pouvoir entre les mains du plan alimentaire, on perd le contact avec nos repères internes et il est plus difficile de reconnaître réellement nos besoins et nos envies. Je crois qu’il est préférable d’améliorer ses habitudes alimentaires en adoptant une structure flexible afin de pouvoir mieux les maintenir à long terme.

Photo de couverture: pvproductions/Freepik

 

Article rédigé par :

Sandra Simoneau                                                                                                                                                                                    Nutritionniste-Diététiste

J’ai à coeur d’aider les gens à retrouver une relation saine avec la nourriture et leur corps. Selon moi, c’est la pierre angulaire vers l’adoption et le maintien de saines habitudes de vie à long terme.

À travers mes articles, je souhaite contribuer à démystifier les croyances en lien avec la nutrition et les aliments, puis fournir des outils afin que manger devienne pour tous synonyme de plaisir et de simplicité !

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